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AFRIQUE: La riposte au SIDA délaisse les hommes

sidaNAIROBI, 18 déc (IPS) – La mention inégalité entre les sexes en matière de SIDA et le fait que plus de femmes que d’hommes vivent avec le VIH surgissent. Mais une autre, la différence basée sur le sexe, rarement abordée, s’avère mortelle pour les hommes vivant avec le VIH.

Les études révèlent qu’à travers l’Afrique les hommes ont de faibles taux de dépistage du VIH, d’enregistrement pour le traitement antirétroviral, d’adhérence, de suppression de la charge virale et de survie, que les femmes.

Faits saillants• En Zambie, 63% des adultes qui commencent le TAR sont des femmes.

• En Ouganda et en Tanzanie, les femmes ont quitté les soins de traitement du VIH 12% moins souvent que les hommes.

• Au Kenya, 65% des femmes sous TAR ont atteint la suppression virale, contre 47% des hommes.

• Au Kenya, 47% des femmes et 33% des hommes ont accepté des personnes vivant avec le VIH.

Source: Centres pour le contrôle et la prévention des maladies”Les hommes sont délaissés en matière d’accès aux soins et au traitement du VIH”, déclare Safari Mbewe, directeur exécutif du Réseau des personnes vivant avec le VIH et le SIDA au Malawi (MANET+).

En décembre 2012, les hommes représentaient seulement 36 pour cent de toutes les personnes sous traitement antirétroviral (TAR) en Afrique, selon le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA).

Au Kenya, la plus récente Enquête sur les indicateurs du SIDA montre que huit femmes sur dix ont fait le test du VIH, contre six hommes sur dix. Cela s’observe à travers le continent.

Généralement, l’accent a été mis sur les risques que les hommes courent concernant le VIH (plusieurs partenaires, les relations sexuelles non protégées, l’abus d’alcool, la violence), qui rendent les femmes plus vulnérables au VIH, et moins sur la vulnérabilité personnelle des hommes par leur mauvais comportement de recherche de santé.

Les différences de genre affectent négativement la façon dont les hommes se comportent dans les programmes de TAR, a indiqué à IPS, Morna Cornell, une chercheuse à l’Université du Cap, en Afrique du Sud.

Parmi les personnes sous TAR, la mortalité est de 31 pour cent plus élevée pour les hommes que pour les femmes, signale Cornell dans une étude, concluant que la plupart des politiques et programmes sur le SIDA en Afrique ignorent les hommes et manquent “d’un véritable engagement à un accès équitable au TAR”.

L’inspecteur de police Ali Mlalanaro est en train de gagner la bataille contre le SIDA en étant ouvert à ce sujet. Photo gracieusement offerte par Amunga EshuchiQu’est-ce qui fait un homme?Au cœur de la disparité se trouvent des idées socialement construites de la masculinité, estime Pierre Brouard, directeur du ‘Centre for the Study of AIDS’ (Centre d’étude du SIDA à l’Université de Pretoria, en Afrique du Sud).

L’inspecteur de police qui ne sera pas délaissé

Ali Mlalanaro, 51 ans, est inspecteur de police dans le comté de Mombasa, sur la côte de l’océan Indien, à 441 km de la capitale, Nairobi.

Il a dit à IPS qu’il se disait qu’il pourrait être infecté par le VIH en 1994, mais n’a pas osé faire le test jusqu’en 1998 lorsque le test s’est révélé positif.

Mais à part la récurrente ‘mshipi’ – le mot swahili pour désigner la ceinture, décrivant une poussée d’herpès autour de sa taille – ce policier était en bon état pendant plusieurs années, jusqu’à ce qu’il devienne très malade en 2007 et a commencé le traitement antirétroviral.

Sa deuxième épouse est décédée du VIH, mais aucun de ses six enfants issus des deux femmes n’est né avec le virus. Plus tard, il a épousé une mère séropositive qui a trois enfants.

Mlalanaro indique que les forces extérieures qui éloignent les hommes des centres de santé sont aussi puissantes que les forces internes.

“Quelque chose en l’homme refuse de reconnaître une maladie jusqu’à ce que celle-ci commence à interférer avec ses activités quotidiennes, et ceci est particulièrement vrai pour le VIH”, dit-il.

Visiter un centre de santé régulièrement est difficile pour les hommes en uniforme. “Nous travaillons des heures inhabituelles, pendant de longues heures, et les transferts sont fréquents”, explique-t-il à IPS.

Il a presque perdu sa bataille contre le VIH à cause de l’alcool et le tabac. “Parce qu’un homme n’acceptera pas qu’il existe quelque chose plus fort que lui qui pourrait le tuer, nous nous perdons dans l’alcool”.

L’adhésion aux ‘Soldiers of Hope’ (Soldats de l’espoir), un groupe de soutien contre le VIH de la Riposte au SIDA parmi les forces en uniforme (ARIFU), a donné à Mlalanaro “le courage de partager ce que je vivais”.

Les hommes craignent la stigmatisation et la discrimination autant que les femmes, souligne-t-il. “Les hommes n’aiment pas parler de leurs sentiments. La divulgation de mon statut était difficile, mais ce faisant, c’est comme si j’ai gagné la moitié de la bataille”.

“Le genre importe en matière de santé”, a-t-il dit à IPS. “La façon dont les hommes se perçoivent et se positionnent par rapport aux services de santé affecte la manière dont ils acceptent le dépistage et le traitement du VIH”.

Etre homme signifie être fort, ignorer la douleur et les symptômes, reporter ses propres besoins en matière de santé, explique-t-il.

Dr Landry Tsague, spécialiste du VIH à l’UNICEF à Lusaka, en Zambie, est d’accord. “Pour beaucoup d’hommes, les hôpitaux sont pour les femmes et les enfants”.

En conséquence, les hommes font le test du VIH et commencent tard le TAR, parfois trop tard pour battre le virus.

Brouard dit que les hommes sud-africains sont plus réticents que les femmes à faire le test du VIH et sont par conséquent moins susceptibles de commencer le TAR.

En 2012, la moitié du nombre d’hommes étaient sous le TAR, comparativement aux femmes – 651.000 hommes et 1,3 million femmes, selon une enquête réalisée en 2012 par le ‘Human Science Research Council’ (Conseil de recherche en science humaine) d’Afrique du Sud.

Les homes et les centres de santéDismas Nkunda, un membre du Réseau pour le plaidoyer en santé de la reproduction en Afrique (RHANA) basé en Ouganda-, explique que les femmes suivent les soins prénatals où le dépistage du VIH est systématique et sont plus susceptibles d’accompagner les membres de leur famille dans les hôpitaux.

“Les hommes interagissent moins avec le système de santé par rapport aux femmes”, dit-il.

Le déni en est pour quelque chose, aussi. “Les hommes peuvent facilement se convaincre qu’ils n’ont pas le VIH jusqu’à ce que la maladie ait atteint le stade tardif”, déclare Diana Mswafari, une activiste anti-VIH en Tanzanie.

Une étude réalisée par les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) au Swaziland, au Mozambique, en Zambie, en Tanzanie et en Ouganda a suivi des personnes pendant quatre ans et demi de TAR.

Non seulement les hommes commençaient tardivement le TAR et étaient plus malades, ils étaient aussi plus susceptibles de faire défaut (stopper le TAR pendant plus de 30 jours), d’interrompre le traitement, et d’abandonner les programmes de soins.

Tsague a déclaré à IPS que “l’adhérence et la rétention des hommes sous traitement sont faibles par rapport aux femmes, et cela est lié à des normes sociales”.

Les hommes sont aussi moins susceptibles de rejoindre les groupes de soutien qui les aideraient à rester sous le TAR.

Dans une étude sur les hommes, la masculinité et le SIDA, Peter Aggleton a écrit que “la masculinité apporte un mélange de coûts personnels ainsi que des avantages – des coûts qui se reflètent dans la santé mentale et physique des hommes, et leur difficulté à parler de leurs sentiments”.

L’autre moitié oubliéeCornell affirme que l’accent des services de santé publique à travers l’Afrique sur la santé maternelle et infantile, accompagné d’un plaidoyer efficace pour les vulnérabilités particulières des femmes en matière de VIH, ont éclipsé les besoins des hommes – “les 50 pour cent oubliés dont les besoins sont toujours secondaire à ceux des femmes et des enfants”.

Les experts recommandent la mise en place des cliniques favorables aux hommes, avec des heures et jours d’ouverture adaptés pour les hommes dans l’emploi formel ou informel.

“Les hommes se sentent mal à l’aise à faire la queue avec des mères et des bébés qui pleurent; ils ont besoin de leur propre petit coin calme”, estime Msafari.

Pour lutter contre la stigmatisation, qui est très élevée au Malawi comme ailleurs en Afrique, Mbewe suggère le recrutement “des quelques hommes qui déclarent ouvertement être séropositifs et sous le TAR pour former des groupes de soutien hommes”.

Ce genre de mesures conscientes de genre aidera à sauver la vie des hommes et à les garder en bonne santé.

Edité par Mercedes Sayagues et Kitty Stapp

By Miriam Gathigah

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